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Zéro Déchet Touraine

Lettre ouverte à Touraine Propre

Mise à la une, Communiqué de presse – jeudi 20 septembre 2018

A l'occasion de l'examen du projet de Plan Régional de Prévention et de Gestion des Déchets (PRPGD) par le syndicat mixte Touraine Propre, nous adressons une lettre ouverte aux membres de son comité syndical, rassemblant les représentants de la majorité des collectivités d'Indre-et-Loire. 

La Riche, le 20/09/2018

Mesdames, Messieurs,

A l’heure où vous êtes appelés à vous réunir pour émettre un avis sur le projet de PRPGD, je souhaite, au nom de l’association Zéro Déchet Touraine, porter à votre connaissance certains faits susceptibles de vous aider à effectuer un arbitrage dans le sens de l’intérêt général.

Je tiens tout d’abord à rectifier certains éléments erronés qui figurent au point 14 du compte-rendu du comité syndical du 20/06/2018 :

  • le plan régional n’est pas un plan de « valorisation des déchets ». Il s’agit d’un plan de prévention et de gestion des déchets. Il est donc normal et légitime que la question de la prévention des déchets occupe une place centrale et prioritaire dans ce plan.
  • Il est faux d’affirmer qu’ « il n’a pas été tenu compte des projets locaux et notamment du schéma départemental ». L’analyse de l’articulation du PRPGD de la région Centre-Val de Loire avec d’autres plans, schémas, programmes ou documents de planification figure dans le rapport environnemental, approuvé le 18 mai 2018 et a été effectuée conformément à l’article R122-17 du Code de l’Environnement. Il a été constaté que le Plan participe à l’atteinte des principales orientations visées par les autres documents de planification. Les effets cumulés du PRPGD et de ces documents auront donc un impact positif sur l’environnement.
  • Mr Dattée n’a pas voté contre ce dossier en comité de pilotage. Mr Dattée a émis un avis personnel défavorable en Commission Consultative d’Evaluation et de Suivi (CCES PRPGD). Nous remarquons en effet qu’aucune délibération donnant pouvoir à Mr Dattée de voter en CCES pour ou contre ce projet de plan au nom de l’ensemble des adhérents de Touraine Propre, n’a été portée au compte-rendu des précédents comités syndicaux.
  • Les associations n’ont pas adopté « un amendement de dernière minute » pour « s’opposer à tout nouveau projet d’équipement ». Soucieuses de l’application de l’art. L541-1 du code de l’environnement qui dispose que « le service public de gestion des déchets […] progresse dans le développement du tri à la source des déchets organiques, jusqu’à sa généralisation pour tous les producteurs de déchets avant 2025, pour que chaque citoyen ait à sa disposition une solution lui permettant de ne pas jeter ses biodéchets dans les ordures ménagères résiduelles », certaines associations représentées à la CCES ont proposé que la construction de nouveaux équipements s’effectue en conformité avec la Loi. Or, celle-ci précise désormais que la création de nouvelles installations de tri mécano-biologique (TMB) d'ordures ménagères résiduelles (OMR) n’ayant pas fait l’objet d’un tri à la source des biodéchets est désormais non pertinente et ne doit plus bénéficier d’aides des pouvoirs publics (art. L541-1 du code de l’environnement, déjà cité). Par ailleurs, la Région-Centre Val de Loire est en surcapacité de stockage et d’installation de traitement des OMR par incinération. Avant d’envisager la reconstruction ou l’élargissement d’un incinérateur, il nous semble plus pertinent d’optimiser les performances énergétiques des unités d'incinération et de suivre cette optimisation, ainsi que les capacités de ces installations. Ces propositions ont été adoptées par la CCES, dans laquelle le collège « Société civile » ne dispose que de 33% des voix.
  • L’Indre-et-Loire n’est pas particulièrement « visée par cette décision ». Le PRPGD concerne les 6 départements régionaux. Il se trouve que l’Indre-et-Loire présente un déficit évident en matière de politiques publiques préventives (fiscalité incitative, prévention des déchets des entreprises, économie circulaire, accompagnement systématique des organisateurs d’événements sportifs et culturels, sensibilisation des touristes, collecte à la source des biodéchets, généralisation du compostage partagé…) par rapport à d’autres départements français. En 2013, seules 4 collectivités sur 14 étaient engagées dans un programme de prévention avec l’ADEME. Le PPGDND n’a été adopté que par une partie des collectivités du département à partir de 2014. Depuis 130 ans, la priorité politique a été donnée à la destruction et plus récemment à la valorisation des déchets, par le biais d’infrastructures dont la durée d’exploitation dépasse rarement la période d’amortissement (incinérateurs de Tours et de l’hôpital de Chinon, usine zymothermique de La Riche, usine de broyage-compostage de Joué-les-Tours, d’Amboise, de Benais, décharges contrôlées de Langeais, Pernay, La Celle-Guénand,…). Une des conséquences de ce mode de gestion est que l’Indre-et-Loire a un besoin perpétuel de nouvelles installations de traitement, qui pèsent lourd sur les budgets des collectivités. La régionalisation de la stratégie de gestion des déchets solutionnera en partie ce problème en exploitant les surcapacités régionales actuelles de stockage et d’incinération. Les objectifs définis dans le plan sont parfaitement atteignables, à condition d’entamer un incontournable changement de paradigme et de pratiques.
  • Il est particulièrement fallacieux de prétendre que « le plan ait été élaboré sous la dictée des associations environnementales ». Le projet de plan a fait l’objet d’un an de concertation, rythmée par 5 réunions de la CCES en séance plénière. Cette construction collective associe représentants de la Région, de l'Etat et des organismes publics, des communes et des groupements compétents en matière de collecte et de traitement de déchets, des Chambres consulaires, des organisations professionnelles, des éco-organismes, des associations agréées de protection de l'environnement, des autres associations (dont la nôtre, qui est une association de citoyens) et des personnes qualifiées. Les 10 groupes de travail se sont réunis chacun à 2 reprises. Un panel citoyen représentatif a été mis en place par la Région, qui a auditionné une grande diversité d’acteurs. Le projet de PRPGD, amendé de 350 remarques et commentaires provenant de tous horizons, a recueilli l’avis favorable de 85,03% des participants à la commission consultative du 18 mai 2018. L’interprétation des faits rapportée dans le compte-rendu du comité syndical est donc totalement erronée. La politique de la chaise vide a forcément des conséquences, mais elle ne saurait justifier une présentation mensongère de la réalité et une nette acrimonie à l’égard d’associations de défense de l’environnement départementales qui demeurent des forces de proposition crédibles, des vigies attentives et vos principaux partenaires et relais auprès de la population.
  • Nous avons sept ans pour expérimenter et agir, avant que les obligations légales ne s’imposent à tous. Utiliser ce délai pour prolonger un modèle sub-optimal ne l’améliorera pas.
  • Si Touraine Propre est lasse des « donneurs de leçons », qu’elle donne l’exemple ! Comment pouvez-vous justifier le report récurrent d’excédents budgétaires ? Le faible niveau de redistribution des cotisations des membres de Touraine Propre sur appels à projets ? Ce ne peut être uniquement par manque d’idées car des dizaines de porteurs de projets vous ont soumis, en vain, des projets innovants ces dernières années. Tous ne méritaient probablement pas d’être soutenus. Mais l’absence de justifications techniques argumentées, écrites et systématiques, en cas de refus n’est pas susceptible d’éclairer les porteurs de projets sur les forces et faiblesses de leur dossier. Ceux-ci devraient pouvoir présenter en personne leur projet devant les membres du comité syndical, après entretien préalable avec le technicien du syndicat mixte. Qui d’autre en effet que le porteur de projet peut mieux répondre à vos interrogations légitimes sur la faisabilité ou l’originalité du projet ?
  • En habitat urbain dense, la collecte séparée des biodéchets et le compostage de proximité fonctionnent. Une vingtaine de collectivités urbaines et rurales, membres du réseau Compost Plus ont mutualisé leurs retours d’expérience sur la mise en place de la collecte séparée des biodéchets, une modalité de traitement complémentaire du compostage de proximité, surtout en habitat urbain dense.

Le PRPGD constitue une avancée très importante en matière de prévention et de gestion des déchets. Il augure une ère nouvelle en soutenant des solutions à la fois plus efficaces, plus responsables et plus respectueuses de l’environnement. De notre point de vue, les principaux points forts de ce plan concernent notamment :

  • le déploiement des Programmes Locaux de Prévention des Déchets Ménagers et Assimilés (PLPDMA) et des démarches de type Zéro Déchet Zéro Gaspillage (ZDZG) sur l’ensemble du territoire;
  • la généralisation du tri à la source des biodéchets, qui devront tous être traités par compostage de proximité, par compostage sur plateforme collective ou par méthanisation au lieu d’être enfouis ou incinérés à partir de 2025 ;
  • la mise en conformité des modes de gestion locaux avec la hiérarchisation des modes de traitement fixés par la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte (2015) ;
  • l’interdiction de construire ou de reconstruire des incinérateurs ;
  • le rappel de la non pertinence de la création de nouvelles installations de Tri Mécano-Biologique (TMB) inscrite dans la Loi ;
  • le contrôle du développement de la filière des combustibles solides de récupération (CSR), en interdisant notamment l’importation de CSR non régionaux afin de respecter le principe de gestion de proximité des déchets inscrit dans la Loi ;
  • la mise en place d’un observatoire régional des déchets et de l’économie circulaire pour une plus grande transparence quant aux résultats obtenus par les collectivités en matière de prévention, de valorisation et de fiscalité ;
  • la programmation d’une étude baptisée «Scénario prospectif régional Zéro déchet à l’horizon 2050 » qui lancerait l’ensemble du territoire régional sur une trajectoire ambitieuse à long terme.

Il est de la responsabilité de la société civile de participer à la fois au débat démocratique et à l’évaluation de la pertinence des politiques publiques. Notre association entendant entretenir un partenariat pragmatique, réaliste et exigeant avec Touraine Propre, il était de mon devoir de vous informer de ces éléments. Nous attendons de ce syndicat un engagement résolu et volontariste en matière de réduction des déchets à la source et nous pensons que le PRPGD représente pour cela une opportunité qui mérite d’être saisie.

Veuillez agréer, Mesdames, Messieurs, l’expression de mes salutations distinguées.

   

Sébastien MOREAU

Président de Zéro Déchet Touraine


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